Le tournant de sa vie est son accession
à la Chaire de Physique Expérimentale de Strasbourg, chaire
la plus en vue de l'empire germanique aprés celle de Berlin. Alors
qu'à cet âge, certains scientifiques ont leur carrière
derrière eux, celle de Ferdinand Braun prend son envol dans l'Institut
de Physique de Strasbourg. A peine installé, il commence à
rénover l'enseignement de physique théorique de l'Institut.
Il s'installe dans ses appartements situés dans l'Institut, met
en place un laboratoire de recherche, et développe une équipe
qui travaillera avec lui pendant presque vingt ans. Rapidement, il se rend
compte du potentiel unique que propose Strasbourg: en effet dès
1895, la ville s'équipe d'un des tous premiers générateurs
de courant alternatif en Europe. C'est une aubaine pour un laboratoire
de recherche qui peut ainsi bénéficier d'une source d'énergie
nouvelle, peu chère, et utilisable rapidement. Cette facilité
qu'offre la vie strasbourgeoise, peu d'instituts de physique peuvent se
l'offrir: Ferdinand Braun, fin connaisseur de la physique ondulatoire et
des phénomènes électriques, en comprend la portée
et s'attèle sur le champ à ses nouveaux travaux de physique
expérimentale.
F. Braun à l'université de Strasbourg
Un tube à tout casser
Deux ans à peine aprés
son arrivée, il met au point le tube cathodique qui porte son nom,
Braunsche röhre (tube de Braun), et qui deviendra ensuite l'oscillographe
cathodique. Qu'est-ce qui rendait possible l'invention d'un tel tube ?
Tout !! D'abord, Ferdinand Braun
lui-même, qui avait enfin la possibilité de travailler dans
un laboratoire digne de ce nom. Il a pu ainsi fabriquer un appareil qui
permettait d'observer directement le courant alternatif strasbourgeois,
ce qui n'était pas possible à l'époque. Le talent
imaginatif, les connaissances techniques, la volonté de déposer
des brevets sont à l'image du personnage.
Mais, plus que tout, ce sont les
connaissances de l'époque qui permirent la fabrication d'un tel
tube. En fait, le tube cathodique de Braun appartient à une famille
nombreuse de tubes tous similaires, appelés tubes de Crookes
ou de Hittorf et qui ont en commun deux caractéristiques. La première
est qu'on pouvait y faire le vide à l'intérieur. L'autre
était qu'il était composé d'une enveloppe en verre
et de deux électrodes, une négative et une positive. A l'époque,
ce tube était exrêmement connu dans les laboratoires européens.
On espérait, grâce
à ce tube, comprendre pourquoi et comment l'électricité
est conduite dans le vide.
Cette famille de tubes a elle-même
une histoire riche en rebondissements, qui ne peut être décrite
ici. Rappelons-nous cependant que les années 1895 à 1897
apportèrent des heures de gloire à ces tubes cousins puisque
dans cette période, trois découvertes majeures en découleront.
C'est d'abord l'invention du tube cathodique par Ferdinand Braun. C'est
également la découverte de curieux rayons, appelés
X par Röntgen, qui permettent de regarder à travers le corps
humain. Enfin, le tube apportera la réponse de la conduction électrique
dans le vide. C'est J.-J. Thomson qui découvrira, grâce à
ce dispositif, l'électron en 1897 et qui en déterminera le
rapport masse sur charge.
Annonce de l'invention du tube cathodique: février 1897
Aprés l'invention de Braun,
les améliorations techniques ne cessèrent point. En effet,
c'est d'abord grâce à un système de miroirs tournants
qu'on pouvait voir la fameuse sinusoïde. Braun et son assistant Jonathan
Zenneck durent également inventer la base de temps qui permet d'observer
la sinusoïde directement sur l'écran du tube cathodique, puis
les différents dispositifs qui permettent d'améliorer la
netteté de l'image.
L'invention de la télévision
sera plus tardive (Zworykin, 1923; Baird, 1926). Etonnamment, cette invention
n'a pas été trés utilisée dans les années
qui suivirent, et les oscilloscopes apparaîtront dans les laboratoires
à partir de l'entre-deux guerres.
Tube de Braun